Discours de Jacques Benoit, coordonnateur de la Coalition Solidarité Santé, à la conférence alternative Notre santé n’est pas une occasion d’affaire$!, de l’R des centres de femmes, le 3 novembre 2011

« Vaut mieux prévenir que guérir !»

C’est ce que nos mères et nos grands-mères disaient quand elles parlaient de prévention : VAUT MIEUX PRÉVENIR QUE GUÉRIR! Elles disaient ça parce qu’elles savaient que prévenir :
1. ça faisait moins mal et
2. ça coûtait moins cher!

Dans les 40 dernières années, on s’est donné l’assurance-hospitalisation et l’assurance-maladie, mais tous les intervenants sérieux en santé et services sociaux, et tous les organismes populaires et communautaires ont continué de dire qu’il fallait faire de la prévention. Pourquoi? Parce qu’ils avaient tous appris et retenu la leçon que VAUT MIEUX PRÉVENIR QUE GUÉRIR.

Alors, depuis hier, croyez-moi, croyez-moi pas, à la conférence de l’INM et CIRANO, on nous parle de… prévention!

Je n’en revenais pas. La prévention! Je me suis dit : enfin, ils ont compris! Comme nous, ils vont dire au gouvernement qu’il faut investir dans la prévention, parce qu’on le sait tous qu’il VAUT MIEUX PRÉVENIR QUE GUÉRIR.

Il y a même un conférencier qui a présenté trois sortes de prévention[1]:
1. la prévention de promotion
2. la prévention médicale
3. la prévention thérapeutique.

Ça, c’est trois fois plus de prévention que j’en connaissais moi-même!

Là, il nous a expliqué que la prévention de promotion, c’est comme… avoir une saine alimentation. C’est une bonne idée, avoir une bonne alimentation, pour prévenir. Mais il nous a expliqué que pour avoir une bonne alimentation, il faut avoir du choix, il faut pouvoir choisir les meilleurs aliments. C’est vrai : si tu n’as pas le choix, tu prends ce qu’il y a! Moi, je trouvais que ça avait « ben d’l’allure ».

Là, il a dit que c’était pareil pour les deux autres : la prévention médicale et la prévention thérapeutique. Pour ceux-là, il faut avoir accès aux examens médicaux préventifs et au dépistage des maladies, et ensuite, aux meilleurs traitements et au meilleur suivi médical pour guérir ou contrôler la maladie. Ça avait encore « ben d’l’allure », j’étais bien d’accord.

Puis il a ajouté que, pour que ça marche, il fallait là aussi pouvoir choisir la meilleure qualité possible. Il fallait qu’on ait le choix! Comme pour l’alimentation! Là, j’ai été moins sûr de ce qu’il voulait dire…

Un peu plus tard, il a expliqué comment il voyait ça : ça prenait un système de santé public… de base, là, puis ensuite, un système privé complémentaire. Là, je me suis senti comme dans la pub à la télé quand la femme parle à son assureur pour assurer son auto, puis qu’elle regarde son mari qui remplit de bois de chauffage la valise de la vieille auto, et qu’elle dit : « Pour celle-là, j’prendrais une protection plus de base, là… puis pour l’autre, une protection plus complète… » Ben là, je me suis senti comme le vieux char qui se fait remplir de bois de chauffage!

C’est là que j’ai compris que lorsqu’ils parlaient de prévention, ce n’était pas parce qu’il VAUT MIEUX PRÉVENIR QUE GUÉRIR, non! Quand ils parlaient de prévention, ce n’était qu’une autre façon de faire entrer le privé par la porte d’en arrière, juste une autre façon de faire de l’argent. Pour eux-autres, la prévention, c’est rien qu’une autre occasion d’affaires.

La prévention, ça va avec la santé.

Et la santé, ce n’est pas une occasion d’affaires. La santé, ce n’est pas une option d’achat.

La santé, c’est un droit, c’est notre droit. Comme peuple, on a déjà fait ce choix!

Et on ne se laissera pas faire : ils n’y toucheront pas!



[1] Ces propos sur les trois sortes de prévention, leur signification, y compris la phrase sur le système public « de base » sont textuellement ceux du panéliste Gil Rémillard, professeur à l’École nationale d’administration publique (ENAP) et avocat-conseil chezFraser Milner Casgrain S.E.N.C.R.L., président fondateur du Forum économique international des Amériques qui organise la Conférence de Montréal et le Toronto Forum for Global Cities, ainsi que le Palm Beach Strategic Forum, président et éditeur de la revue économique FORCES