UN BUDGET CONTESTÉ
Le gouvernement libéral de Jean Charest s’est mis en tête de retrouver l’équilibre budgétaire en 2013-2014. Pour y arriver, il a choisi de couper les dépenses dans les services publics et de hausser les taxes. Afin de financer le système de santé et de services sociaux, le ministre des Finances a proposé de nouvelles mesures : la contribution santé, la franchise santé (le ticket modérateur) et le fonds de financement des établissements de santé et de services sociaux (le fonds santé).À la suite d’une levée de bouclier, il a dû reconnaître le gros bon sens et abandonner l’idée d’une franchise santé dont les coûts d’administration auraient excédé les revenus escomptés.
Les nombreuses hausses de tarifs des services publics annoncées dans le budget 2010 du gouvernement du Québec reflètent sa volonté de généraliser le principe de l’utilisateur-payeur comme mode de financement des services publics. D’un mode de financement collectif par l’impôt progressif, on passe à un financement individualisé, par la tarification. Cette approche s’inscrit dans une logique de privatisation globale des services publics, tout comme le recours à des pratiques de gestion empruntées au secteur privé appliquées aux services publics.
LA CONTRIBUTION SANTÉ : UNE MESURE INJUSTE ET INÉQUITABLE
Cette contribution individuelle de 25 $ en 2010 passera à 100 $ en 2011 et à 200 $ en 2012, des montants fixés sans égard à la capacité de payer des gens. L’objectif de récolter 945 millions $ par an équivaut à la somme que le gouvernement Charest a consenti en baisse d’impôts en 2008. Or, les baisses d’impôts profitent surtout aux plus riches et aux grandes entreprises alors que la contribution santé pèsera plus lourdement sur la classe moyenne, les femmes, les personnes pauvres, les personnes âgées et les personnes retraitées. Seuls les ménages très défavorisés en seront exemptés.
Une charge supplémentaire de 200 $ pour une personne dont le revenu est modeste représente un fardeau financier beaucoup plus élevé que pour celle qui gagne 300 000 $ et plus. Les femmes sont particulièrement touchées par la tarification croissante des services de santé. Comparativement aux hommes, elles ont moins facilement accès à l’emploi et à la syndicalisation, elles gagnent des salaires inférieurs et elles occupent plus souvent des emplois précaires et à temps partiel. Avec un revenu moyen autour de 20 000 $, donc au dessus du seuil d’exemption de la contribution santé, les personnes âgées sont également très affectées. La contribution santé constitue une brèche dans le mode habituel du financement de la santé par le moyen des impôts, considéré comme le plus équitable. Elle ouvre la voie à d’autres tarifications.
LE FONDS SANTÉ
Constitué par les sommes prélevées grâce à la contribution santé, le fonds santé sera dédié au financement des établissements et réparti en fonction de leur performance. Celle-ci sera définie à partir du volume d’interventions. Qu’en est-il dans ces conditions de la qualité des soins et services offerts ?
Plutôt que d’améliorer le réseau actuel, d’accroître l’accessibilité à un médecin de famille, de réduire les listes d’attente et de développer les soins à domicile, ce financement risque fort de servir à réduire le déficit des établissements. Leur financement dépendra de la performance économique de leurs administrateurs, de leur capacité d’autofinancer les activités. Avec la pression des indicateurs de performance qui ne tiennent pas compte de la prévention et du suivi des patients, la réduction des durées de séjour à l’hôpital, par exemple, devient vite une façon d’atteinte des objectifs à court terme au détriment d’une vision globale à long terme. Nous croyons que ces pratiques de gestion du secteur privé sont difficilement compatibles avec le fait d’accorder la priorité aux besoins de la population, sur la base des principes d’accessibilité et d’universalité.
NOS SOLUTIONS
Pour garantir l’accessibilité et la qualité des services publics et ainsi préserver le droit à la santé, nous préconisons plutôt une approche basée sur l’équité, la solidarité sociale et l’universalité des services publics:
- Accroître les revenus de l’État grâce à une fiscalité progressive qui réclame davantage d’impôts des particuliers dont les revenus sont très élevés et des entreprises qui réalisent des profits considérables.
- Contrôler les dépenses en réduisant le coût des médicaments, principale composante de la forte croissance des dépenses de santé. Selon les données de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ), la hausse annuelle moyenne des dépenses en médicamentent et services pharmaceutiques se situe à 14,1 %.
La Coalition Solidarité Santé réclame au gouvernement la mise en place d’une politique du médicament qui priorise la santé de la population plutôt que les intérêts de la très puissante et profitable industrie pharmaceutique et de l’industrie de l’assurance. Ce qui se traduit par l’adoption d’une politique d’achat des médicaments au plus bas prix comme il en existe dans plusieurs pays, l’utilisation accrue de médicaments génériques qui coûtent moins chers que les médicaments brevetés et la fin des subventions généreuses et des exemptions fiscales pour les lucratives compagnies pharmaceutiques. Dans le but d’assurer à toute la population l’accès aux médicaments et de maîtriser la croissance des coûts, nous demandons au gouvernement d’analyser la possibilité de mettre en place un régime public universel d’assurance médicaments, administré par la RAMQ.
SE MOBILISER
Le gouvernement nous oblige à payer de plus en plus cher pour accéder aux services de santé, peu importe le revenu dont nous disposons. Nous nous opposons à la contribution santé et à toute forme de ticket modérateur. Nous réclamons l’abolition du fonds santé qui permet au gouvernement d’introduire le principe d’une contribution des usagers. Nous refusons la mise en place du principe d’utilisateur-payeur et nous dénonçons la tendance du gouvernement à appliquer une logique de financement du système de santé basée sur des critères d’efficacité économique sans égard aux besoins de la population desservie. Car la santé est un droit, pas un bien de consommation.
La Coalition Solidarité Santé regroupe des organisations syndicales, communautaires et religieuses ainsi que des comités de citoyennes et citoyens. Elle défend le droit à la santé pour l’ensemble de la population québécoise, et ce, sans égard au statut ou au revenu.