Depuis près de 20 ans, tous les groupes qui ont étudié l’avenir du système de santé québécois ont été unanimes à réclamer une priorité à l’accès à des services de santé et des services sociaux de première ligne. Pourtant, le gouvernement québécois fait fi des consensus en investissant, à ce moment-ci, l’équivalent de deux stades olympiques dans la construction de bâtiments destinés à la livraison de services médicaux spécialisés et ultraspécialisés et un autre stade dans un projet de carte à puce dont l’efficacité n’a pas été démontrée. «C’est comme si on construisait le troisième et le quatrième étages d’un bâtiment sans s’être assuré de l’état des fondations et des premiers étages», précise Marie Pelchat, porte-parole de la Coalition Solidarité Santé.
Le gouvernement s’apprête à investir 2,5 milliards dans les centres universitaires et possiblement un autre milliard dans le projet de carte à puce alors qu’il se refuse à investir dans les services directs à la population.
D’ailleurs, 3,5 milliards, ce n’est pas peu dire. Ce qu’il en coûtera en remboursement en intérêts, capital et frais de fonctionnement supplémentaires soit près de 500 millions par an est l’équivalent du montant qui nous permettrait de doubler le nombre de personnes (5000 travailleuses et travailleurs de plus) qui assurent les services à domicile à un million de Québécoises et de Québécois ayant des incapacités.
Des questions centrales demeurent pourtant sans réponse. Des investissements de 1,3 milliard sont prévus au CHU McGill sans que n’ait été réglée la question de l’accès physique au site. Plus de 1,2 milliard sont prévus pour construire un CHUM sur un site remis en question par le président de l’Association professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec.
Des groupes et des personnes avisées ont notamment recommandé d’autres avenues qui n’ont pas été entendues. Toutes, constate la Coalition, vont dans le sens de construire un ou des pavillons supplémentaires sur le site d’un hôpital existant. (La proposition David Levine en 1995, alors qu’il était directeur de l’hôpital Notre-Dame qui chiffrait la proposition à 235 millions, la proposition Marsan, la proposition des Médecins pour la justice sociale et la proposition Lazure en 2002). Ces propositions alternatives visent toutes à répondre aux besoins spécifiques de la formation universitaire et d’autre part, à préserver nos investissements faits dans nos actuels hôpitaux montréalais. Elles ont notamment pour effet de ne pas réduire le nombre de lits alors que nous en manquons déjà cruellement. Ce qui n’est le cas avec les propositions retenues par le gouvernement québécois.
Le risque est grand que ces projets ne grugent toutes les marges de manœuvres pour l’amélioration des services à la population et ce, pour plusieurs années. Pourtant, dans l’état actuel des choses, le droit à l’erreur n’existe tout simplement pas.
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