Au moment où la campagne électorale se mettait en marche, un sondage rendait compte que la première préoccupation des Québécois demeurait, et de loin, la santé. À l’image de la population, la Coalition Solidarité Santé, qui regroupe près d’une cinquantaine d’organisations syndicales, communautaires, féministes, religieuses et citoyennes, est sérieusement préoccupée par les politiques mises en place ces dernières années pour tenter de résoudre les nombreux problèmes récurrents qu’accuse notre système public de services sociaux et de santé.
Beaucoup de questions mériteraient d’être abordées pendant cette campagne électorale. Nous en avons choisi trois qui ont une incidence marquante tant au niveau des revenus que des dépenses en santé et services sociaux.
Sachant que chaque parti en lice aux élections place la santé en haut de ses priorités, non seulement en termes d’importance pour la population mais aussi au regard des finances publiques, nous souhaitons que votre parti fasse connaître ses positions sur les sujets ci-dessous avant le 20 août 2012.
Voici maintenant les questions, que nous vous soumettons avec une brève mise en situation :
1. La contribution santé, aussi appelée « taxe santé » :
Cette taxe, introduite au rapport d’impôt 2010 au coût fixe de 25$ par adulte, a augmenté à 100$ l’année suivante et connaîtra une nouvelle hausse à 200$ en 2012. Que votre revenu annuel soit de 15 000$, 150 000$ ou 1 500 000$, vous payez le même montant. Nous considérons cette taxe comme socialement injuste et fiscalement inéquitable. L’équité fiscale commande une contribution en fonction de la capacité de payer, i.e. qui tient compte du revenu des individus. Le financement des services publics sociaux et de santé doit se faire par des impôts progressifs appliqués aux individus et aux entreprises, en fonction de leurs revenus. Par conséquent, il faut abolir la taxe santé et redonner de la progressivité aux impôts des particuliers et des entreprises.
Quelle est votre position par rapport à la taxe santé?
2. Le régime hybride d’assurance-médicaments :
Mis sur pied en 1996, et bien qu’ayant constitué une avancée importante par rapport à la situation qui existait, le régime actuel d’assurance médicaments montre bien les travers inhérents à son côté hybride :
- du côté public : un déficit récurrent annuel de 2 G$ (comblé par une augmentation des primes de 242% en 12 ans, et par les impôts), croissance annuelle des dépenses de 8%;
- du côté privé : croissance annuelle des coûts de 10 à 15%, frais administratifs quatre fois plus élevés que dans le public, coût des assurances collectives qui va de pair avec la croissance du coût des médicaments;
et plus généralement :
- la règle dite « des 15 ans » qui oblige le gouvernement à rembourser pendant 15 ans le prix (plus élevé) d’un médicament d’origine, même si une version générique (et moins chère) est mise en marché; le Conseil du Trésor admettait qu’en 2012, cette règle lui coûterait 193 millions$ pour un retour de 37 M$ de l’industrie;
- les supposés investissements en R&D, alors qu’il a été démontré que les hausses du prix des médicaments financent davantage le marketing et les actionnaires que la recherche de nouveaux médicaments;
- les « nouveaux médicaments »: seulement 0,2 % des nouveaux médicaments mis sur le marché actuellement présentent une « innovation majeure», mais 100 % de ces «nouveautés» se vendent beaucoup plus cher que leurs versions équivalentes plus anciennes.
Tous ces facteurs font que les québécoises et les québécois paient 38% de plus pour leurs médicaments que les autres citoyens de pays développés!
La mise sur pied d’un régime universellement public d’assurance médicament, accompagné d’une politique du médicament, permettrait d’économiser plus d’un milliard de dollars de fonds publics, des sommes qui pourraient être réinvesties pour améliorer les services publics sociaux et de santé.
Quelle est votre position par rapport à la mise sur pied d’un tel régime universellement public d’assurance médicaments, accompagné d’une politique du médicament?
3. La sous-traitance/privatisation des services publics sociaux et de santé:
Permission d’assurance privée pour des soins de santé, sous-traitances de chirurgies à des cliniques privées, utilisation d’agences privées pour des services infirmiers, contrats en PPP pour des établissements de services et de soins, etc, depuis les 10 dernières années, les ouvertures au privé se sont multipliées, favorisant le développement de ce secteur de la santé au détriment du système public, cannibalisant ses ressources humaines (désengagement de médecins de la RAMQ, professionnels préférant travailler au privé plutôt qu’au public), avec comme conséquences d’annihiler les efforts engagés pour réduire les temps d’attente pour des services ou des soins, et d’augmenter la pression sur le personnel soignant restant pour maintenir la qualité et la quantité de services dispensés. Si encore cette situation coûtait moins cher aux citoyens et au Trésor public. C’est tout le contraire, et pour des raisons évidentes et fondamentales au privé : la notion de profits! Car pour faire des profits, le privé:
– diminue la quantité ou la qualité des services pour un même prix;
– diminue la qualité des conditions salariales et de travail de son personnel, ou la qualité même du personnel rendant les services;
– à quantité et qualité égale, augmente les prix.
Et plus souvent qu’autrement, il combine les trois!
Les problèmes du système public de services sociaux et de santé ne se résolvent pas par plus de privé : les véritables solutions sont publiques, parce que réalisées au prix coûtant et pour le bien (certains diraient « au profit ») de l’ensemble de la société.
Quelle est votre position par rapport à l’utilisation de la sous-traitance et du privé pour solutionner les problèmes du système public de services sociaux et de santé ?
À la lecture des mises en situation, il est évident qu’à la Coalition solidarité santé, nous avons un parti pris pour un système public de santé, et parce que toute la société en profite, nous considérons que son financement doit être public, via des impôts progressifs s’appliquant à toute la société, i.e. aux particuliers et aux entreprises.
Depuis sa fondation en 1991, la Coalition a toujours été motivée dans ses actions par la défense du droit à la santé pour l’ensemble de la population québécoise, et ce, sans égard au statut ou au revenu des citoyennes et des citoyens. Elle défend le caractère public, la gratuité, l’accessibilité, l’universalité et l’intégralité des services de santé et des services sociaux.
Convaincus que votre parti considérera l’importance des questions soumises et que la population a besoin de connaître vos réponses pour faire un choix éclairé lors de l’élection générale, nous vous rappelons que nous souhaitons que votre parti fasse connaître ses positions sur les sujets soulevés ci-haut avant le 20 août 2012.
D’ici là, recevez, Mesdames, Messieurs, nos meilleures salutations.
Jacques Benoit,
Coordonnateur
Voici les réponses des partis:
10 Août, Coalition Avenir Québec
Nous accusons réception de votre courriel. Soyez assuré que nous traiterons votre demande dans les plus brefs délais. Merci de votre support! C’est assez, faut que ça change!
L’équipe de la Coalition Avenir Québec
We acknowledge reception of your e-mail. It will processed as soon as possible and a response will follow in due time. Thank you for your support! Enough, vote for change!
Coalition Avenir Québec Team
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13 août, Parti Libéral du Québec
Vous avez fait parvenir au chef du Parti libéral du Québec, monsieur Jean Charest, une lettre datée du l0 août 2012 concernant les positions de notre formation politique en regard de certains sujets qui vous préoccupent plus particulièrement.
Soyez assuré que votre correspondance recevra toute la considération qu’elle requiert.
Nous vous remercions d’avoir communiqué avec nous et vous prions de recevoir, Monsieur, nos salutations les meilleures.
Samuel Murray
Directeur du contenu
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16 août, Option nationale
Nous avons reçu votre lettre datée du 10 août 2012 et nous nous empressons d’y répondre malgré un agenda chargé qui nous a été imposé par le gouvernement Charest en déclenchant des élections en plein été.
Dans votre lettre, vous voulez connaître notre position relativement à 3 préoccupations que vous soulevez, à savoir la taxe santé, le régime hybride d’assurance-médicaments et la sous-traitance dans le domaine de la santé.
Concernant la taxe santé, même si nous n’avons pas abordé spécifiquement cette question lors de notre congrès de fondation, il est raisonnable de croire que nos membres pourraient éventuellement se prononcer pour l’abolition de cette taxe lors de notre prochain congrès ou lors de la prochaine conférence nationale du parti, puisque cette mesure décretée par le gouvernement Charest n’est vraiment pas compatible avec l’esprit du programme que nous avons adopté en matière de santé et qui met l’accent sur la consolidation du caractère public et universel de notre système de santé. Nous vous prions donc de prendre note que vous trouverez parmi les membres et dirigeants dans notre parti un appui solide pour l’abolition de cette taxe.
En ce qui concerne le régime d’assurance-médicaments, nous vous référons à la proposition 4.7 de notre programme qui se lit comme suit : Un gouvernement d’Option nationale créera Pharma-Québec, société d’État responsable de la gestion des produits pharmaceutiques dans le réseau québécois de la santé, dans le but de freiner la hausse du coût des médicaments au Québec. Pharma-Québec pourra également produire ses propres médicaments génériques.
Enfin, pour ce qui est de la sous-traitance et de la privatisation des services publics sociaux et de santé, vous avez une réponse dans la philosophie générale exprimée par nos membres à l’article 4.1 du programme qui se lit comme suit : Un gouvernement d’Option nationale réaffirmera le caractère public et universel du système de santé québécois. La participation du secteur privé sera limitée.
Espérant le tout conforme, nous vous prions d’agréer, cher monsieur, l’expression de nos sentiments les plus distingués.
Denis Monière
Option nationale
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20 août, Québec solidaire
Nous partageons tout à fait vos préoccupations. Voici nos réponses à vos questions. Elles sont courtes, mais il y a bien peu à dire lorsqu’on est d’accord.
1. Nous abolirons la contribution santé. Nous perdons des revenus annuels de 950 millions de dollars ce faisant, mais économiserons 2,7 milliards de dollars avec la mise en place de Pharma-Québec. L’augmentation de la progressivité de l’impôt des particuliers avec 10 paliers d’imposition et l’augmentation du taux d’imposition des entreprises iront chercher respectivement 1,3 milliards et 800 millions de dollars pour l’État québécois.
2. Québec solidaire mettra en place une assurance médicaments publique et universelle de même que Pharma-Québec, un pôle public d’acquisition et de production de médicaments. Cet organisme s’engagera également dans la voie de la recherche et développement et permettra ainsi de réelles avancées pharmaceutiques.
3. Québec solidaire garantira des soins de santé et des services sociaux publics, universels, gratuits, de qualité et de proximité, 24 heures sur 24, grace à des mesures concretes pour mettre fin à la privatisation dans le réseau (p. ex. : étanchéité renforcée entre le public et le privé, frais accessoires éliminés). Québec solidaire prévoit d’ailleurs économiser 60 millions de dollars annuellement en cessant de recourir aux agences privées de placement en santé.
Si de nouvelles questions surgissent à la lecture de ces réponses, n’hésitez pas à nous contacter de nouveau. Vous trouverez ci-joint notre plateforme électorale complète ainsi que notre cadre budgétaire.
Veuillez agréer, Monsieur, l’expression de nos sentiments les plus sinceres,
Régent Séguin
Secrétaire général de Québec solidaire
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24 août 2012, Parti québécois
Au nom de la chef du Parti Québécois, Pauline Marois, je donne suite à votre lettre du 10 août dernier concernant les engagements électoraux.
Comme vous le savez, au cours de la présente campagne électorale, nous avons réitéré un engagement que nous avons pris il y a quelques mois d’abolir c’est odieuse taxe santé. L’abolition de la taxe santé se fera à coût nul. Cette mesure de 1 milliard de dollars sera financée par la création de deux nouveaux paliers d’imposition pour les contribuables dont le revenu annuel imposable s’élève à plus de 130 000 dollars et à plus de 250 000 dollars.
De plus, les déductions fiscales applicables aux gains en dividendes et à certains gains en capital seront réduites de 50 %.
En ce qui a trait à la mise en place d’un régime universel d’assurance médicament, il s’agit d’une orientation qui n’a pas été retenue par notre formation politique.
Enfin, le Parti Québécois a fait la bataille contre les agences privées d’infirmières dans le réseau de la santé. Il s’agit à notre avis d’un type de sous-traitance que nous devons contrer au nom de la qualité des soins offerts aux patients, mais également pour le prix. Rappelons que l’utilisation des agences privées d’infirmières dans le réseau de la santé et des services sociaux coûte entre 15 % et 20 % plus cher que des infirmières dont les établissements sont les employeurs.
Nous sommes d’avis que nous devons améliorer le système public de santé, mais la sous-traitance des soins vers le secteur privé ne représente pas une voie à privilégier.
Le 4 septembre prochain, la population choisira la direction que doit prendre le Québec.
Le projet que propose notre parti permettra à tous les Québécois de reprendre le contrôle de leur avenir au sein d’une société meilleure, plus riche et plus juste.
Veuillez agréer, Monsieur le Coordonnateur, l’expression de mes sentiments les meilleurs.
Martin Caillé
Directeur du contenu
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