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SI LE PASSÉ EST GARANT DE L’AVENIR…

(Présentation de Jacques Benoit, coordonnateur de la Coalition solidarité santé)

(Vidéo de l’Assemblée)

Le 1er avril 2015 entrera en vigueur le PROJET DE LOI 10. Dans chacune des régions du Québec, des CSSS seront fusionnés avec d’autres établissements et l’Agence régionale pour créer d’immenses Centres intégrés de Santé et de Services sociaux (CISSS) ou Centres intégrés universitaires de Santé et de Services sociaux (CIUSSS). Des 182 établissements existants, le réseau public de santé et de services sociaux du Québec ne comptera plus que 34 établissements.

Le 1er avril 2015, le ministre de la Santé et des Services sociaux deviendra le principal décideur de toutes questions tant locales, régionales que nationales, il contrôlera tout, tant la prestation que le prestataire des soins et services, il nommera ou démettra toutes personnes responsables. Ainsi, que l’on travaille dans le réseau public de la santé, ou dans le milieu communautaire qui y collabore, ou qu’on soit simplement citoyenne et citoyen du Québec ayant droit à la santé et à des soins et services publics de santé, personne ne sera épargné. Le ministre dit qu’il sabre la bureaucratie, mais dans les faits, il coupe plutôt dans la démocratie.

Le 1er avril 2015, avec l’application du PROJET DE LOI 10, débutera la plus grande entreprise de privatisation du système public de santé et de services sociaux québécois. 

Parce que, comme on dit, « si le passé est garant de l’avenir,… »

Allons voir ce passé pas si lointain. 

Mais avant, nous tenons à vous faire cette mise en garde : toute ressemblance avec des personnes ou des événements existants ou ayant existé pourrait ne pas être que pure coïncidence.

Nous sommes en 2003. Le 4 avril : élection du Parti Libéral à Québec; premier ministre : Jean Charest; ministre de la Santé désigné: Philippe Couillard.

6 mois plus tard, à l’automne : dépôt par le ministre Couillard du PL 25 qui fusionne les hôpitaux, les CHSLD et les CLSC pour former des Centres de Santé et de Services sociaux (CSSS), et créer les Agences régionales de SSS. Les objectifs poursuivis : améliorer l’accès aux services, diminuer la bureaucratie, faire des économies.

Le 19 décembre: imposition d’un bâillon pour l’adoption du PL 25.

2006, en juin : dépôt par le ministre Couillard du PL 33 permettant trois chirurgies en clinique privée et leur couverture par des assurances privées.

6 mois plus tard, le 13 décembre : imposition d’un bâillon pour l’adoption du PL 33.

2007 : par voie règlementaire, le ministre Couillard permet aux médecins de s’incorporer (DR INC). Ceux et celles qui changeront de statut légal changeront également de statut fiscal, pouvant être reconnus comme entreprise privée, et ayant ainsi accès à des déductions pour entreprises.

En juin 2008 : d’abord le 18, par décret, le ministre Couillard ajoute une cinquantaine de traitements médicaux ou de chirurgies pouvant être réalisées en cliniques privées spécialisées avec couverture d’assurances privées (Vous vous souvenez du PL 33 adopté sous le bâillon en 2006? de trois chirurgies, on passe à 50! Ça s’appelle avoir de la suite dans les idées).

Puis, une semaine plus tard, le 25 juin : toujours par décret, le ministre Couillard réduit de moitié le coût des permis de clinique privée spécialisée, avant de démissionner et de quitter la politique.

Moins de 2 mois plus tard, le 18 août : M. Couillard rejoint Persistence Capital Partners, une société qui se décrit elle-même comme « le seul fonds privé d’investissement au Canada dédié à développer des opportunités d’investissement offrant un fort potentiel de croissance dans le secteur de la santé ». M. Couillard parle d’acquisitions futures, pour PCP, de « cliniques d’imagerie médicale […] ou de cliniques médicales ou de chirurgie, comme la Clinique Rockland ».

Toujours en 2008, en décembre : devant une assemblée d’assureurs, le nouveau partner Couillard plaide pour le privé en santé, expliquant qu’on devrait «autoriser l’ouverture de plus de cliniques privées associées, permettre aux médecins québécois de pratiquer dans le privé et autoriser les Québécois à contracter des assurances privées pour des actes couverts par le régime public ». Il ajoute qu’«il n’y a rien de scandaleux à ce qu’on fasse des profits dans le secteur de la santé» et que « l’une des réalisations dont il [était] le plus fier en cinq ans passés à la tête du ministère de la Santé, c’est l’entente [de sous-traitance pour des chirurgies] conclue avec [la clinique médicale privée] Rockland MD ».

En 2010, un rapport d’évaluation du MSSS fait état qu’après six ans de fusion des CSSS, il n’y a pas d’amélioration d’accès aux services, que la surcharge de travail observée au début chez les gestionnaires est toujours aussi importante sinon plus, que la distance entre les installations complexifie la gestion, que la structure organisationnelle n’est pas encore totalement stabilisée, que les membres du personnel se sentent isolés et peu soutenus, que dans plusieurs CSSS, la stabilité de l’organisation n’est pas encore gagnée et qu’il y a un sentiment de confusion à savoir qui relève de qui et qui fait quoi.

De plus, presque tous les sites ont eu recours à des consultants ou à des firmes extérieures privées pour certains dossiers tel le soutien des cadres intermédiaires dans la gestion du changement ou la rédaction de documents stratégiques. 

Je le rappelle : cette évaluation est faite six ans après des fusions qui ont réunies sous une seule administration de CSSS en moyenne une dizaine d’établissements, et jusqu’à 18 pour le plus gros, celui de Laval.

Il y a un an presque jour pour jour, le 12 Mars 2014, la Coalition solidarité santé tenait ici même au Centre St-Pierre une assemblée publique pour faire le bilan de 10 ans des CSSS.  Les panélistes étaient David Levine, ex-PDG de l’Agence de la Santé et des Services sociaux de Montréal, André-Pierre Contandriopoulos, professeur et chercheur à l’Université de Montréal, René Lachapelle, ex-organisateur communautaire du réseau de la santé et chercheur associé à l’UQO et Johanne Archambault, ex-responsable de l’Observatoire québécois sur les réseaux locaux de services. 

Ces personnes nous ont fait part de leur évaluation respective des fusions d’établissements, et des résultats obtenus au regard des attentes.

Pour toutes les personnes présentes à l’assemblée, panélistes inclus, les fusions de 2004 n’ont pas rempli les promesses faites. Au contraire, elles ont plutôt causé les problèmes suivants :

1) Augmentation du pouvoir des médecins au détriment de la première ligne

2) Perte de proximité des services

3) Peu (ou pas) d’intégration ni de continuité des services, approche populationnelle trop complexe

4) Coupures et réductions de services

5) Détérioration des services sociaux

6) Des structures trop grosses et ingérables

7) Recul de la démocratie

8) Impact négatif sur le personnel et les relations de travail

9) Une gestion inappropriée: la Nouvelle gestion publique

10) Augmentation de la privatisation.

Dix problèmes pour dix ans de fusions.

Le dernier problème, l’augmentation de la privatisation, c’est le pire des résultats qu’on a vu se développer avec les fusions. On a utilisé les ressources du public au service du privé, contrairement à ce que disait le gouvernement libéral de l’époque (son slogan était « le privé au service du public »).  On a ainsi sous-traité des services d’entretien, de buanderie, d’alimentation, de fournitures médicales, des services à domicile, des chirurgies, des agences de personnel, et on a utilisé des PPP pour des hôpitaux, dans l’hébergement, etc. 

En dix ans, la sous-traitance, la privatisation, l’économie-socialisation, la communautarisation et les PPP ont pris place et sont mieux implantés partout dans notre système public de santé et de services sociaux. 

En 10 ans, les budgets de la santé ont doublé, et le nombre de cadres a augmenté de 30%.

Et le PL 10 que nous a présenté le ministre Barrette, de par ses fusions à beaucoup plus grande échelle encore, ne fera qu’amplifier tous ces problèmes, privatisation incluse. Alors, si ce n’est pas le résultat escompté, il est encore temps de faire marche arrière : on ne peut faire la même erreur deux fois, parce que la deuxième fois, ce n’est plus une erreur, c’est un choix!

D’ailleurs, deux organismes qui ont appuyé le PL 10 nous laissent croire que ce n’est pas une erreur. 

D’abord, la Fédération des Chambres de commerce du Québec (FCCQ), qui écrivait lors de la commission parlementaire : 

« …le secteur public doit envisager, de façon pragmatique, des alliances avec le privé,… La Fédération signale aussi que la sous-traitance dans la production d’un service public ou d’une de ses composantes peut être aussi bien livrée par une entité publique [que] par une entreprise privée, une coopérative ou une OSBL. De plus, d’un point de vue de développement économique, les entreprises peuvent profiter des marchés publics pour prendre de l’expansion. Dans les fonctions susceptibles de faire l’objet d’une sous-traitance concurrentielle, la Fédération indique notamment les fonctions auxiliaires (comme l’entretien ménager ou les services informatiques), les chirurgies d’un jour ou encore l’hébergement et les soins de longue durée pour personnes âgées. »

Elle ajoutait également que : 

« La modification de l’organisation et de la gouvernance du système de santé […] s’insère dans la révision générale de la fiscalité et des programmes de l’État, à laquelle la FCCQ participe activement. Tel que mentionné dans son mémoire présenté aux commissions Godbout et Robillard, la FCCQ rappelle que l’exercice de fond que le gouvernement du Québec est en train de mener doit s’inscrire dans une réflexion plus large sur les rapports entre l’État et les entreprises. L’État peut en fait être un état-percepteur, à travers la fiscalité des sociétés; un état-soutien, à travers les programmes et mesures d’aide aux entreprises; ou encore un état-acheteur, à travers le choix des modes de production et de fourniture des services publics.

L’autre organisation ayant appuyé le PL 10, l’Institut sur la gouvernance des organisations privées et publiques (IGOPP), ajoutait ce conseil: 

Le modèle de gestion proposé par le projet de loi 10 […] est bien rodé dans le secteur privé où il porte le nom de «gouvernance stratégique » ou « gouvernance interne ». Toutefois, ce modèle de gestion est rare et méconnu dans le secteur public. Il faudra donc devenir clair et explicite quant à son fonctionnement et fournir aux dirigeants des CISSS la formation appropriée. »

Devrions-nous ajouter que le PL 10 consacre également l’omnipotence du ministre et de son ministère, ce qui revient à dire que l’on consacre l’éloignement des milieux, le déracinement, et la méconnaissance des complexités du terrain. C’est la recette parfaite pour augmenter l’inefficacité, les erreurs et le gaspillage, sans diminuer les budgets consacrés à l’administration.

Mais revenons à notre voyage dans le temps. 

En avril 2014, le 7 avril plus précisément : élection du Parti Libéral à Québec; premier ministre : Philippe Couillard; ministre de la SSS : Gaétan Barrette.

À l’automne (6 mois plus tard –encore?) : dépôt par le ministre Barrette du Projet de loi 10 fusionnant tous les établissements, les CSSS et l’Agence régionale SSS d’une même région (sauf exception) pour former d’immenses Centres Intégrés de Santé et de Services sociaux (CISSS) ou Centres Intégrés Universitaires de Santé et de Services sociaux (CIUSSS). Objectifs : Améliorer l’accès aux services, diminuer la bureaucratie, faire des économies!

7 février 2015: imposition d’un bâillon pour adopter le PL 10.

Et en février, Radio-Canada annonçait qu’après 7 années de DR INC, 45 % des 22 500 médecins du Québec (près de 10 250) sont incorporés, ce qui fait perdre plus de 150 M$ d’impôts aux gouvernements.

Alors, que devrions-nous prévoir pour les années à venir?

Vous l’avais-je dit au début?… Si le passé est garant de l’avenir,… je vous laisse prédire la suite.

Avant de terminer, j’aimerais encore dire…

Lors de l’étude article par article en commission parlementaire, Françoise David a proposé un amendement: biffer à l’article 1 les objectifs du projet de loi 10, parce que ce n’est pas vrai que le PL 10 va simplifier l’accès aux services, améliorer la qualité et accroître l’efficience. 

Bien qu’incapable d’identifier un article qui y concourrait, qui en parlait ou expliquait comment cela allait se faire, bref, qui démontrait l’adéquation entre les objectifs de son PL et les moyens qu’il contient, le ministre s’est dit convaincu que « l’ensemble de sa réforme » allait atteindre ces objectifs et, par conséquent, l’amendement fut rejeté. 

Le ministre l’avait pourtant dit lui-même très clairement lors de notre passage en commission parlementaire : 

« J’l’ai dit cent fois en trois semaines : le projet de loi 10, en termes d’accès à la première ligne, c’est pas ça qui va régler ça, c’est autre chose. Le «autre chose» est en train de se discuter et on verra bien où c’est que ça va finir. J’l’ai dit, là. J’peux pas être plus clair que ça : ne reprochez pas au projet de loi 10 de ne pas s’adresser à l’accès alors qu’il n’est pas fait, le projet de loi, pour s’adresser à l’accès.”

Ça m’apparaît pourtant essentiel et fondamental : le ministre contredisait son propre projet de loi!  

Et en ce qui me concerne, ça ressemble drôlement à quelque chose…

D’ailleurs, sur le site du SPVM , on trouve cette définition :

« La fraude consiste à mener malhonnêtement le public ou une personne à encourir une perte financière, à se départir d’un bien ou à fournir un service à la suite d’une tromperie, d’un mensonge, d’un abus de confiance ou de tout autre moyen semblable.

Comment différencier un VOL d’une FRAUDE?

La présence ou l’absence de consentement demeure le critère permettant de distinguer le VOL de la FRAUDE. Ainsi,

– il y aura VOL lorsqu’une personne s’empare d’un bien sans le consentement  de la victime.

– il y aura FRAUDE lorsqu’une personne s’approprie un bien, un service ou de l’argent avec le consentement de la victime, mais que ce consentement a été obtenu par tromperie ou ruse ou tout autre moyen malhonnête. »

Alors, selon vous, pourrait-on dire que…

… Le ministre mène malhonnêtement la population du Québec à encourir une perte financière, à se départir d’un bien (comme le réseau public de SSS pour le privatiser)?

… Que de par l’omnipotence qu’il se donne avec son PL, il s’approprie tous les services publics sociaux et de santé, avec le consentement de la victime (la population, l’Assemblée nationale), mais que ce consentement est obtenu par tromperie ou ruse ou tout autre moyen malhonnête (comme sa seule parole, son instinct, sa conviction personnelle,… et à l’encontre de tout ce qui se fait, se dit, s’écrit, s’étudie et s’enseigne partout dans le monde)?

D’après vous, pourrait-on porter une accusation?…

 

Merci de votre attention.

Allocutions et discours Documents Événements et actions Privatisation Lean

Montréal. Une lettre portant 1105 signatures, dont celles de 680 organisations variées, a été déposée lundi au ministre responsable de l’Accès à l’information et de la Réforme des institutions démocratiques, monsieur Jean-Marc Fournier. Les signataires, rassemblant au moins 10 000 OSBL, s’opposent à l’assimilation d’organismes sans but lucratif (OSBL) à la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme. Selon eux, cette assimilation causerait davantage de problèmes qu’elle n’en résoudrait. Il en va de même pour l’ajout, à la liste des activités à déclarer au Registre du lobbyisme, des appels à l’action dirigés vers le grand public (voir la lettre et la liste des signataires).

Les signataires de cette lettre proviennent de tous les secteurs et de toutes les régions du Québec : groupes d’entraide, maisons de jeunes, groupes de bénévoles, ressources pour les familles, centres communautaires, associations du domaine des sports, des arts, de la science et des loisirs, groupes et coalitions de défense des droits collectifs, de sensibilisation à divers enjeux sociaux, de protection de l’environnement, de défense des services publics, etc. 

Malgré la demande des signataires, le ministre ne s’est pas engagé à tenir une consultation générale lors du dépôt du projet de loi, alors qu’il vient d’annoncer qu’il en tiendra une concernant les orientations  gouvernementales en matière de transparence. Quant au contenu du projet de loi, tout au plus a-t-il indiqué qu’il pourrait réduire les démarches d’inscription au Registre. Loin de remettre en question le fait d’assujettir tous les OSBL, il a plutôt réitéré son appui aux propositions du Commissaire et de l’Association des lobbyistes du Québec sur le sujet. Rappelons que ces propositions ont été rejetées deux fois, par de larges consensus lors des consultations, en 2008 et 2013.

« Le futur projet de loi risque de compromettre la survie des organismes en défense collective des droits humains en termes de santé, de sécurité, d’environnement et de lutte à la pauvreté, entre autres. La mobilisation sociale et la représentation politique étant au cœur de leur mission, ils interpellent couramment les élus pour défendre les droits de populations vulnérables, et ce, au bénéfice de l’ensemble de la société » rappelle Marie-Hélène Arruda, coordonnatrice du Regroupement des organismes en défense collective des droits.

La différence entre la défense des intérêts privés et celle des intérêts collectifs ainsi que leurs pratiques d’intervention, était au cœur de l’objectif du gouvernement lors de la création de la Loi en 2002. Selon l’ancien ministre de la Justice, Jacques P. Dupuis : « Le législateur ne voulait pas viser les associations ou groupements qui s’occupent de promouvoir les causes d’intérêt commun susceptibles de profiter à la collectivité (en matière environnementale, par exemple) par opposition à ceux qui défendent l’intérêt économique de quelques personnes ou groupes de personnes (…) les représentations faites en public sont en soi dévoilées. Au contraire, celles qui ont lieu en dehors de ce cadre demeurent occultes. Le souci de transparence vise ce qui est caché, il n’est donc pas utile de divulguer ce qui se passe en public ou ce qui est notoire »(1).

« Rien ne démontre que l’inclusion de tous les OSBL serait devenue nécessaire. Il n’y a aucun conflit d’intérêts à déclarer lorsque l’on défend les intérêts de toute la population. En fait, si les propositions formulées par le Commissaire au lobbyisme étaient appliquées, le droit d’association et la liberté d’expression seraient sérieusement compromis. Par exemple, les droits d’être informés, de participer et d’avoir accès à la justice environnementale ne seraient plus défendus si les bénévoles cessaient d’intervenir, pour éviter d’avoir à s’inscrire au registre » de préciser Karine Péloffy, avocate et directrice générale du Centre québécois du droit de l’environnement.

La délégation a présenté au ministre plusieurs scénarios où le fait d’assujettir tous les OSBL et leurs actions nuirait à l’exercice de la citoyenneté et aurait plutôt l’effet d’un bâillon. « Pour les groupes environnementaux, une partie de la mission est d’encourager la population à jouer un rôle actif dans les débats publics. Protéger l’environnement nécessite que rien ne freine le dialogue entre la population et les personnes chargées de prendre les décisions pour la collectivité » se désole Floris Ensink, président du Sierra Club Québec.

« Nous avons invité le ministre à reconnaître que le lobby exercé par une compagnie pharmaceutique n’est pas comparable aux interventions effectuées par un mouvement de lutte contre la pauvreté, pour ne prendre que cet exemple. La Loi doit tenir compte de ces différences dans la définition même du lobbying. Les OSBL n’ont rien en commun avec des lobbyistes visant à favoriser des intérêts particuliers ou privés. Dans le cas d’une coalition comme la nôtre, c’est toute la population qui bénéficie de notre défense du rôle de l’État en matière de santé et de services sociaux » de souligner Jacques Benoît, coordonnateur de la Coalition solidarité santé.

Malgré le caractère notoire des « appels au public », le ministre ne s’est pas engagé à les exclure de l’application de la Loi. « Il est inconcevable qu’un groupe qui invite publiquement la population à transmettre une lettre à des titulaires de charges publiques doive s’inscrire comme lobbyiste. Chaque année, des milliers d’OSBL lancent et participent à de telles campagnes. Dans le réseau des groupes communautaires du domaine de la santé et des services, ces appels mettent à contribution des dizaines de milliers de personnes qui y œuvrent. Pourquoi devraient-elles inscrire au registre des informations déjà visibles ? » de questionner Mercédez Roberge, coordonnatrice de la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles.

L’ampleur et la diversité des signatures recueillies ne sont qu’un prélude à l’opposition que rencontrera le ministre s’il tente d’assujettir les OSBL et les coalitions d’OSBL qui en sont formés, et de considérer les appels au public comme du lobbyisme. Un projet de loi allant dans ce sens aurait des conséquences néfastes sur l’exercice de citoyenneté, sur le droit d’association et sur la liberté d’expression. 

 

(1) Québec, Rapport sur la mise en œuvre de la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme et du Code de déontologie des lobbyistes, 2007, pages 15 et 17.

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Pour informations :

Kim De Baene 514-222-4912

La lettre et la liste des 1105 signataires déposées et des informations sur les conséquences pour les OSBL sont disponibles sur http://bit.ly/1xlS1gQ

Porte-parole du Groupe des organisations opposées à l’assujettissement de tous les OSBL à la Loi sur le lobbyisme : Mercédez Roberge, coordonnatrice de la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles

 

Communiqués

Bonjour,

N.B. Nous vous demandons de faire suivre et de diffuser ce message le plus largement possible dans vos rangs et vos milieux.

La Coalition solidarité santé, une coalition provinciale qui regroupe une quarantaine d’organisations syndicales, communautaires et religieuses pour la défense du droit à la santé pour l’ensemble de la population québécoise, a tenu ce matin une conférence de presse en réaction à l’imminence d’un bâillon forçant l’adoption du PL 10 du ministre Barrette.

Dans une lettre adressée à tous les députéEs libéraux, la Coalition leur a demandé de ne pas voter de bâillon, de rappeler le ministre Barrette à l’ordre pour qu’il retire son PL 10 et qu’il tienne de véritables consultations avec les acteurs du réseau sur l’avenir du système de Santé et de Services Sociaux.

Voici le communiqué de presse résultant de cette conférence de presse (avec photos en p.j.), ainsi que la lettre envoyée à tous les députéEs du PLQ.

Or il y a quelques minutes, le gouvernement annonçait qu’il recourrait au bâillon vendredi pour adopter le PL 10.

Nous vous demandons, comme éluEs locaux et régionaux, comme représentantEs de la population de toutes les régions du Québec, de faire pression auprès de vos députéEs, surtout si ils et elles siègent pour le parti au pouvoir, le Parti Libéral.

Dites-leur que le système public de santé et de services sociaux que nous avons bâti au Québec, et dans lequel nous avons investi plusieurs dizaines, voire des centaines de milliards de dollars depuis quarante ans, ce système nous appartient à toute la population, y compris celle qui habite dans toutes les régions du Québec.

Dites-leur que nous l’avons construit afin que plus jamais la santé des familles québécoises ne dépende de l’épaisseur de leur portefeuille, et que les soins et services de santé soient accessibles sur tout le territoire du Québec, quelle que soit la région habitée.

Dites-leur que le PL 10, qui va regrouper sous un même grand chapeau (CISSS) tous les établissements d’une même région, ne va améliorer que les pouvoirs du ministre au détriment des besoins des milieux en soins et services.

Dites-leur que dans ces nouveaux grands ensembles, il ne vous restera plus grand-chose pour faire valoir vos réalités, vos particularités, vos originalités.

Dites-leur que vous y perdrez le pouvoir de dire votre mot, de parler, discuter et décider de vos conditions de vie et de santé.

Dites-leur que si ils et elles votent ce bâillon, et adoptent ainsi ce PL 10, ils et elles devront en répondre devant vous.

Dites-leur bien que vous ne l’oublierez pas, le jour venu, parce que ce sera le dernier pouvoir qu’il vous restera.

Dites-leur, dites-leur, dites-leur, vite!

Solidarité!…

Jacques Benoit, coordonnateur.

Analyse, chronique et lettre ouverte

Si la crise de 2008 nous a rappelé une chose, c’est que les dynamiques mondiales peuvent avoir des effets profonds sur nos sociétés. Est-on assez vigilant quant aux changements que provoque la mondialisation débridée des marchés? Mesure-t-on adéquatement la portée des mesures qui la favorisent et leur impact structurant sur notre avenir?

Nous avons maintes fois mis en lumière les enjeux soulevés par les accords de libre-échange, à commencer par le manque total de transparence dans lequel ils sont négociés. Mais les obligations propres à ces accords demeurent largement dans l’angle mort alors que leur conjonction avec les mesures d’austérité actuelles nous semble explosive, pour au moins trois raisons.

Premièrement, les accords risquent d’aggraver une situation économique déjà précaire. Selon l’économiste Jim Stanford, le déficit commercial du Canada par rapport à l’Europe se creusera encore davantage en raison de l’Accord économique et commercial global (AÉCG) entre le Canada et l’Union européenne. Le texte négocié, désormais public, confirme la libéralisation des marchés publics et les restrictions à la capacité d’intervention de l’État dans l’économie. Au-delà de certains seuils, les gouvernements, les municipalités, les sociétés d’État comme Hydro-Québec, seront forcés d’ouvrir leurs appels d’offres à la concurrence étrangère et d’accorder leurs contrats au plus bas soumissionnaire. Il ne sera plus possible de se servir des achats publics pour stimuler le développement local. Jumelé à la disparition des CLD et des CRÉ, les retombées pour l’économie de nos régions risquent de s’avérer dramatiques. Le Conseil du Patronat propose d’abandonner les régions en déclin, est-ce là un hasard?

De plus, le libre-échange met les travailleuses et les travailleurs de différents pays en concurrence les uns contre les autres, entraînant une détérioration des conditions de travail. À quelques exceptions près, la baisse des prix à la consommation se fait davantage par la robotisation, par des économies d’échelle et par une exploitation plus grande de la main d’oeuvre que par une diminution des tarifs douaniers qui sont à des niveaux très bas depuis plusieurs années (en moyenne 2,2 % pour les produits canadiens exportés en Europe). Or, comme nous le savons, la stagnation des salaires depuis des décennies au Québec a été accompagnée d’une augmentation des inégalités sociales touchant spécifiquement les femmes, surreprésentées dans le travail précaire et dont le salaire est moindre que celui des hommes. Les mesures d’austérité viendront renforcer ces inégalités affectant les conditions de vie et de travail.

Deuxièmement, il ne fait plus aucun doute que les accords de libre-échange vont générer de nouvelles dépenses pour l’État. Aussi bien l’AÉCG que le Partenariat transpacifique (PTP), négocié avec 12 pays de la zone d’Asie-Pacifique, prévoient prolonger les brevets des médicaments. Ceci retardera la mise en marché des médicaments génériques, beaucoup moins chers. Selon une étude du Centre canadien des politiques alternatives, si l’AÉCG devait être ratifié, le coût des médicaments pourrait augmenter jusqu’à 1,65 milliard de dollars par année, au profit des richissimes pharmaceutiques multinationales. Alors que le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec doit gérer un budget particulièrement serré, ces coûts supplémentaires auront d’importantes conséquences.

Ces deux accords incluent également la disposition controversée de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE), qui permet aux entreprises étrangères de poursuivre les États lorsqu’ils prennent des décisions susceptibles d’avoir un impact sur les profits qu’elles s’attendent à réaliser. En vertu de ce mécanisme, en 2012, l’entreprise française Veolia a entamé des poursuites contre le gouvernement égyptien suite à l’augmentation du salaire minimum de 41 à 72 euros par mois! Ou l’État recule quant à sa législation, ou il paye. Est-ce que notre économie y gagne dans un cas ou dans l’autre? Ces mesures sont si extrêmes que la France et l’Allemagne s’inquiètent des impacts sur leur propre souveraineté et appellent à une renégociation de l’AÉCG pour ne pas accorder ces «droits» démesurés aux multinationales, comme le rapportait le Devoir le 27 janvier dernier. Au Québec, on prend toute la mesure du danger lorsqu’en vertu de l’ALÉNA, l’entreprise Lone Pine Resources conteste le moratoire sur les gaz de schiste avec sa poursuite pour un montant de 250 millions $.

Troisièmement, et c’est sans doute l’élément qu’il ne faudra surtout pas oublier, les accords de libre-échange comme l’AÉCG ou le PTP rendront définitives les privatisations futures qui découleraient des mesures d’austérité. Même si l’on arrivait plus tard à juger celles-ci comme étant inefficaces ou contraires à l’intérêt public, il serait impossible de revenir en arrière, sous peine d’être poursuivi par un investisseur étranger pour une perte de profits anticipés. Cela va des services municipaux, à la gestion des ressources naturelles ou aux services publics.

En résumé, les politiques d’austérité et le libre-échange agissent de façon complémentaire pour transformer le rôle de l’État. Dans les deux cas, les gouvernements limitent leur champ d’action, on accroît les inégalités et on réduit la portée de la démocratie. Tout cela sous prétexte de favoriser une reprise économique qui est plus qu’incertaine. A-t-on déjà oublié que c’est justement la croissance des inégalités et la dérégulation financière qui sont à l’origine de la crise dont nous ne sommes pas encore sortis? Que l’austérité succède au sauvetage des banques? Pour nous, les solutions sont ailleurs, et certainement pas dans des accords qui augmenteront le pouvoir de la grande entreprise aux dépens des droits humains, économiques, sociaux et culturels, et de la lutte contre les changements climatiques.

 

COLLECTIF D’AUTEURS / Pierre-Yves Serinet, coordonnateur, RQIC

Michel Lambert, directeur général, Alternatives / Carolle Dubé, présidente, APTS / Sandrine Louchart, AmiEs de la Terre Québec / Claude Vaillancourt, président, Attac-Québec / François Vaudreuil, président, CSD / Louise Chabot, présidente, CSQ / Denise Gagnon, présidente, CISO / Élisabeth Garant, directrice, Centre justice et foi / Anouk Nadeau-Farley, présidente, CDHAL / Martine Chatelain, présidente, Coalition Eau Secours ! / Jacques Benoît, coordonnateur, Coalition Solidarité Santé / Véronique Laflamme et Kim De Baene, Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics / Suzanne Audette, 2è vice-présidente, CCMM-CSN / Jacques Létourneau, président, CSN / Alexa Conradi, présidente, FFQ / Alexis Tremblay, président, FECQ / Régine Laurent, présidente, FIQ / Daniel Boyer, président, FTQ / François Saillant, coordonnateur, FRAPRU / Dominique Peschard, président, Ligue des droits et libertés / Joël Pedneault, co-coordonnateur, MÉPACQ / Lucie Levasseur, présidente, SCFP-Québec / Denis Bolduc, secrétaire général, SCFP-Québec / Lucie Martineau, présidente, SFPQ / Richard Perron, président, SPGQ / Daniel Roy, directeur québécois, Syndicat des Métallos – FTQ / James Given, président, SIU Canada / Patrice Caron, vice-président, SIMC / SIU Canada / Raymond Larcher, président, UES section locale 800 / Benoit Girouard, président, Union paysanne / Maxime Laplante, vice-président, Union paysanne

(publié dans Le Soleil, 22 février 2015)

Analyse, chronique et lettre ouverte

Montréal. – Dans une lettre  qu’elle adresse aujourd’hui aux députés libéraux, la Coalition solidarité santé leur demande de ne pas voter de bâillon pour l’adoption du projet de loi 10 (PL 10), mais plutôt de rappeler à l’ordre le ministre Barrette pour qu’il retire son projet de loi et tienne de véritables consultations sur l’avenir du réseau public de santé et de services sociaux.

La Coalition réagit ainsi à la rumeur voulant que le gouvernement s’apprête à imposer un bâillon dans les prochains jours pour forcer l’adoption de son projet de loi modifiant l’organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l’abolition des agences régionales.

Dans les derniers mois, la Coalition a rencontré une vingtaine de députés, majoritairement du PLQ, à leurs bureaux de circonscription. Si certains ont laissé entendre qu’il n’y avait pas unanimité dans le caucus, la Coalition remarque que « beaucoup de ces députés étaient peu ou pas informés sur le PL 10, sur ses impacts, sur les enjeux sous-tendus et les dangers qu’il entraîne, de même qu’à propos de l’opposition généralisée  qui s’est manifestée en commission parlementaire. »

La Coalition se dit convaincue que le PL du ministre n’atteindra pas les objectifs visés. Par exemple, le ministre Barrette prétend que son PL va faire économiser 220 millions de dollars, mais la Coalition rappelle que c’était aussi ce que prétendait Philippe Couillard il y a dix ans, en 2004, quand il a réalisé les fusions qui ont créé les CSSS. « Pourtant, depuis 10 ans, le budget de la santé a doublé, ce n’est pas ce qu’on pourrait appeler des économies ! », fait remarquer Jacques Benoit, coordonnateur de la Coalition. La Coalition doute fort que poursuivre les fusions à plus grande échelle encore améliore la situation.

Autre élément que soulève la Coalition dans sa lettre: les contradictions dans le discours du ministre et de son gouvernement. Alors que l’article 1 du PL définit comme objectif de « favoriser et de simplifier l’accès aux services pour la population », le ministre Barrette a déclaré à de très nombreuses reprises en commission parlementaire que son projet de loi n’était « pas fait pour s’adresser à l’accès » (Intervention du ministre Barrette, 12 novembre 2014 – 00:24:37 à 00:27:05). Pire, le premier ministre a déclaré que le PL allait supprimer « un niveau intermédiaire de gestion pour redonner l’argent pour les soins aux patients », pendant que le ministre Barrette déclarait de son côté à Radio-Canada que les 220 millions de dollars ne seraient pas réinvestis, mais serviraient à l’atteinte du déficit zéro ! « Qui devons-nous croire ? À qui la population doit-elle se fier ? », demande Jacques Benoit.

Mais ce qui inquiète le plus la Coalition, c’est que le PL 10 n’est qu’un élément du puzzle (PL 20, PL 28, et d’autres encore à venir) « constituant une réforme majeure qui modifiera profondément le système public de santé », écrit-elle dans sa lettre. « Le ministre nous demande de juger ça à la pièce et de lui faire confiance pour le reste », fait remarquer M. Benoit. « À la lueur de toutes ces contradictions, et de tous les enjeux que cela soulève, ça nous est impossible : nous n’avons plus confiance », explique la lettre.

M. Benoit était accompagné de Jeff Begley, de la Fédération de la Santé et des Services Sociaux (FSSS-CSN), de Claire Montour de la Fédération de la Santé du Québec (FSQ-CSQ), de Martine Robert de l’Alliance du Personnel professionnel et Technique de la Santé (APTS), de Serge Morin du Syndicat Canadien de la Fonction Publique (SCFP), de Mercedez Roberge de la Table des Regroupements Provinciaux d’Organismes Communautaires et Bénévoles (TRPOCB), de Diana Lombardi du Réseau d’Action des Femmes en Santé et Services Sociaux (RAFSSS) et de Doris Provencher de l’Association des Groupes d’Intervention en Défense de Droits en Santé Mentale du Québec (AGIDD-SMQ), des organisations membres de la Coalition solidarité santé. C’est ensemble qu’ils ont parlé de cet appel aux députés du PLQ, rappelant leur responsabilité envers la population qui les a élus, dans toutes les régions du Québec, une population qui compte sur eux pour défendre le système public de services sociaux et de santé. «Nous avons bâti ce système public pour avoir notre mot à dire sur notre santé, pas pour nous faire bâillonner! », conclut Jacques Benoit.

À propos de la Coalition solidarité santé

La Coalition solidarité santé regroupe une quarantaine d’organisations syndicales, communautaires et religieuses. Depuis sa fondation en 1991, ses actions ont toujours été motivées par la défense du droit à la santé pour l’ensemble de la population québécoise, et ce, sans égard au statut ou au revenu des citoyennes et citoyens. Elle défend le caractère public, la gratuité, l’accessibilité, l’universalité et l’intégralité des services de santé et des services sociaux.

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Renseignements :  Jacques Benoit, coordonnateur de la Coalition solidarité santé : 514-442-0577

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