Pour un système public de santé et de services sociaux fort, universel, accessible, gratuit et démocratique!

Lettre ouverte de la Coalition solidarité santé

Depuis sa création en 1991, la Coalition solidarité santé a défendu sans relâche le système public de santé et de services sociaux du Québec et le droit à la santé pour toutes et tous. Nous tenons aujourd’hui à souligner le travail exceptionnel accompli dans des conditions extrêmement difficiles par les travailleuses et les travailleurs du réseau. Nous souhaitons également rappeler toute l’importance d’avoir un système socio-sanitaire public et universel. Alors que le monde entier est frappé de plein fouet par la pandémie de COVID-19, les Québécoises et les Québécois peuvent compter, grâce aux luttes de celles et ceux qui nous ont précédé.e.s, sur des services de santé et des services sociaux gratuits, accessibles indépendamment de leur capacité de payer.

La catastrophe humaine et sanitaire à laquelle nous sommes confronté.e.s est porteuse de beaucoup de souffrance, d’anxiété et de stress. En plus des vies perdues et des deuils qui frappent plusieurs d’entre nous, de nombreuses personnes vivent une détérioration rapide de leur situation économique. En effet, les mesures de confinement, essentielles pour préserver la capacité du réseau à face à la crise et minimiser le nombre de décès, sont aussi génératrices de difficultés financières importantes, en particulier pour les personnes déjà précarisées.

Dans ce contexte, il aurait été désastreux que notre principal rempart face à la crise soit un système de santé privé dont les buts principaux sont la rentabilité et le profit. Il aurait été ignoble d’ajouter à la détresse causée par la pandémie en faisant porter aux individus le poids insoutenable des frais médicaux associés au diagnostic et au traitement de la COVID-19. Comme le montre l’exemple malheureux de notre voisin du sud, ces frais peuvent atteindre des dizaines de milliers de dollars pour une seule personne!

Le Québec doit donc se féliciter d’avoir fait le choix collectif de la solidarité et de s’être doté au début des années 1970 d’un système public et universel de santé et de services sociaux. Et les mouvements syndicaux, populaires, féministes et communautaires peuvent être fiers d’avoir contribué à le créer et de l’avoir fidèlement défendu contre tous les assauts qui, depuis sa création mais plus encore dans les deux dernières décennies, n’ont cessé de se multiplier.

Faire mieux pour l’avenir : vers une déprivatisation et une démocratisation des services de santé et des services sociaux

Si la crise actuelle nous rappelle plus que jamais l’importance d’avoir un système public de santé et de services sociaux fort, accessible, universel et gratuit, elle révèle aussi cruellement les lacunes béantes qui affaiblissent notre réseau : le sous-investissement chronique, les multiples réformes déstructurantes, les coupes drastiques dans la santé publique, la centralisation bureaucratique, l’élimination des lieux de pouvoir citoyen, la détérioration des conditions de travail, les méthodes de gestion autoritaires (nouvelle gestion publique, Lean), les pénuries de personnel, l’appauvrissement de la première ligne (notamment en services à domicile) et la privatisation grandissante des services ont contribué au désastre humanitaire qui se joue présentement sous nos yeux, en particulier au sein des résidences pour personnes âgées.

Ces lacunes ne sont pas des fatalités mais bien le résultat de choix politiques qu’il est possible de renverser. Il nous faut imaginer un nouvel horizon pour notre système de santé et de services sociaux. Pour y parvenir, il faut commencer dès maintenant à réfléchir aux mesures qu’il sera essentiel de mettre en œuvre au sortir de cette crise sanitaire sans précédent. Nous proposons les mesures suivantes comme contribution à la réflexion collective : 1) un réinvestissement massif immédiat; 2) une déprivatisation complète des services de santé et des services sociaux; 3) un recentrement du réseau sur les services de premières ligne et la prévention (ce qui passe notamment par une revalorisation des services sociaux); 4) une décentralisation et une démocratisation de la gestion des établissements qui permettra de les ancrer dans leur communauté et de redonner aux citoyen.ne.s, aux usagères.ers et aux travailleuses.eurs du réseau un pouvoir sur leurs services et leurs conditions de travail.

La Coalition solidarité santé lance donc aujourd’hui un appel à la (re)construction d’un système socio-sanitaire public à la hauteur des valeurs de solidarité et de justice sociale historiquement portées par les mouvements sociaux du Québec.