Catégorie : <span>Allocutions et discours</span>

Ce soir, nous avons essayé de comprendre les raisons qui ont amené le gouvernement de l’époque à fusionner des établissements de santé qui assumaient plutôt correctement leur mandat, pour en faire de très gros établissements où les diverses missions ont été fusionnées tant bien que mal, mais surtout mal, et en précisant un nouveau mandat : la mise sur pied de réseaux locaux de services.

En 2004, le Ministre Couillard avait dit que le privé ne pouvait concurrencer le public parce que la société québécoise n’avait pas permis que se développe un système privé fort comme aux USA. Il avait dit aussi que sa réforme prendrait dix ans à jouer son rôle.

À quel rôle faisait-il allusion? Vous vous souvenez du slogan du gouvernement Charest : le privé au service du public?… En fait, ce fut exactement le contraire : utiliser le public au service du privé, les ressources publiques pour le développement du privé. 

Ce soir, on a entendu des gens nous parler :

– d’hospitalo-centrisme, au niveau des budgets, des territoires, du curatif, des médicaments, de la technologie;

– d’organisation du travail où le médecin est au centre avec son hôpital. ou c’est l’hôpital qui est au centre avec ses médecins, c’est selon;

– de la promotion de la santé et de la prévention qui ont été perdantes;

– du fait que nous savions comment faire des équipes multidisciplinaires mais que nous ne les avions pas toujours faites;

– qu’il y a confusion chez le personnel, et plus encore chez les personnes soignées sur qui fait quoi, on ne le sait pas toujours;

– qu’il y a des résultats variables selon les régions avec des bons et des mauvais coups;

– que les critiques que nous faisons du réseau sont utilisées contre nous par les tenants de la privatisation;

En fait, selon qu’on est un gestionnaire ou ex-gestionnaire qui avait des objectifs à défendre, un citoyen qui a besoin de soins et services et qui ne sait plus où s’adresser pour les trouver, un ex-employé qui a pris sa retraite à temps et qui compare maintenant avec avant, un employé actuel du réseau qui se fait presser comme un citron jusqu’à être sur le bord d’une dépression, bref, selon qui nous sommes, nous avons des points de vue différents sur ces fusions. 

Mais une chose semble tous nous rejoindre : entre ce qu’on nous avait dit, les objectifs qu’on nous avait présentés, et ce qui en a résulté, il y a une marge plutôt importante, sinon, une contradiction flagrante. 

Et on pourrait risquer une explication.

Au ras des pâquerettes, ce qu’on voit, c’est que l’aboutissement de cette fusion a été la mise sur pied des réseaux locaux de services, sorte d’excroissances artificielles du réseau public. Ces réseaux locaux de services sont devenus des réseaux parallèles de services, composés de privé, d’économie sociale et de communautaire, pouvant concurrencer le secteur public dans l’accomplissement des soins et services, tout en rongeant de plus en plus les budgets publics. Les immenses CSSS ont utilisé les réseaux locaux de services pour réduire les soins et services que leurs composantes assumaient auparavant, et en transférer graduellement la prestation en sous-traitant des organismes privés, d’économie sociale et communautaires.

N’oublions pas que d’autres lois ont été adoptées à peu près à la même époque pour s’arrimer avec les fusions d’établissements :  

• la loi 30 qui fusionnait les accréditations syndicales, en regroupant le personnel en 4 grands groupes;

• la loi 31, qui modifiait l’article 45 du code du travail pour faciliter la sous-traitance et la privatisation, 

• puis un peu plus tard la loi 33 autorisant des chirurgies au privé. 

10 ans plus tard, on y est : force est de constater qu’on a utilisé les ressources du public au service du privé.  On a ainsi sous-traité des services d’entretien, de buanderie, d’alimentation, de fournitures médicales, des services à domicile, des chirurgies, des agences de personnel, et on a utilisé des PPP pour des hôpitaux, dans l’hébergement, etc. En dix ans, la sous-traitance, la privatisation, l’économie-socialisation, la communautarisation et les PPP ont pris place et sont mieux implantés partout dans notre système public de santé et de services sociaux. 

Et 10 ans après, pour nos gouvernements, PLQ-PQ confondus, il est temps de passer à une autre étape, et renforcer le tout pour que ça se développe encore plus.

C’est la raison pour laquelle le gouvernement Charest, au printemps 2012, avait mis sur pied le Groupe d’experts sur le financement par acte. Dès son élection, à l’automne 2012, le PQ s’est empressé de confirmer le mandat de ce comité, le renommant au passage Groupe d’experts sur le financement axé sur les patients.

Ce mode de financement est l’instrument budgétaire par lequel va se poursuivre la sous-traitance, la privatisation, et le développement du système privé de soins et services.  

Parce que… Quand on établit un prix pour chaque chose, qu’on met en concurrence les prestataires et leurs services, que le moins cher devient le meilleur, qu’on vise le volume plutôt que la qualité, quand le patient est vu comme un « revenu », ce n’est plus de la santé, c’est un marché! 

Et l’assurance autonomie va permettre d’enraciner plus profondément les principes et lois du marché en autorisant et en rémunérant à contrat des dizaines et des dizaines de prestataires différents, tant pour les services professionnels de base que pour les soins à la personne et l’aide domestique. 

Bien sûr, on nous dira qu’il s’agit de la poursuite du développement des réseaux locaux de services, mais ce sera le privé sous toutes ses formes qui grugera de plus en plus les services accomplis par le personnel du secteur public, et s’accaparera du budget de la santé pour son propre profit. 

Et les patients, eux, qui seront vus dorénavant comme des « revenus »?… Ils devront débourser de plus en plus de leurs poches pour obtenir des soins et services nécessaires au maintien de leur état de santé, ou alors s’en remettre à leurs proches aidantes.

Ce soir, en voulant en faire le bilan, nous devons constater que les fusions ont été l’élément central d’un vaste plan d’utilisation des ressources de notre système public de services sociaux et de santé pour développer les services privés, pour que les dizaines de milliards de $ du budget de la santé ne soient plus à l’abri du monde privé des affaires.

Ce soir, nous n’avons peut-être pas de solutions concrètes à proposer. Mais ce soir, nous devons être conscients plus que jamais qu’il nous faut alarmer nos concitoyennes et concitoyens : il y a plus qu’un loup dans la bergerie, et le reste de la meute attend à la porte.

En sortant, vous trouverez sur la table notre manifeste pour un système public de services sociaux et de santé. Prenez-le, lisez-le, passez-le autour de vous et discutez-en. 

Et au moment où tous les partis sillonnent le Québec, plus que jamais, nous devons leur répéter que la santé, c’est pas une occasion d’affaires!

La santé, c’est un droit.

Et au Québec, comme peuple, on a déjà fait ce choix!

 

Jacques Benoit, 

Coordonnateur de la Coalition solidarité santé

La mise au jeu de la soirée.

Voir le communiqué de presse.

Résumé des présentations et conclusions des panélistes.

Voir l’intégralité de l’assemblée.

Allocutions et discours Documents Services publics

FRAIS ACCESSOIRES

JE ME SOUVIENS…

En campagne électorale, le chef du Parti libéral du Québec, Philippe Couillard, et son candidat vedette dans Brossard, le Dr Gaétan Barrette, promettaient l’ouverture de 50 supercliniques dans lesquelles, disaient-ils, « les citoyennes et citoyens du Québec pourraient payer avec leur carte d’assurance maladie. »

18 mois plus tard, le chef du Parti libéral s’est transformé en premier ministre, le candidat vedette en ministre de la Santé et des Services sociaux, les supercliniques ne sont pas encore ouvertes mais  la carte d’assurance maladie, elle, se transforme déjà en carte de crédit.

Les frais accessoires ne sont que la pointe de l’iceberg des soins et services que devront payer les citoyennes et citoyens. Déjà, une révision à la baisse de l’offre de services et soins nécessaires a créé et allongé des listes d’attente qui ont forcé plusieurs à recourir au privé, parce qu’il n’y a pas de liste d’attente pour les maladies et les besoins : les cas continuent de s’aggraver. Ceux et celles qui n’ont pas les moyens de payer se reposent sur leurs proches, en majorité des femmes, ou alors doivent s’en passer.

Et cet état de choses va s’amplifier : le Commissaire à la santé et au bien-être tient depuis cet été des consultations sur le panier de services assurés. En même temps, les experts de l’Institut national d’excellence en santé (INESSS) doivent aider les établissements à définir ce qui est pertinent ou non comme soins et services, et l’objectif rendu public à la fin août est de couper 450M$ ans le réseau d’ici le 1er avril prochain.

Les frais accessoires sont l’exemple, le cheval de Troie par lequel la désassurance de soins et services va passer.

Pourtant, dans la dernière année, sur tous les tons et à tour de rôle, le premier ministre Couillard, et les ministres Barrette, Leitao et Coiteux nous ont répété que « peu importe qui fait la prestation de services, l’important est que le financement soit public ».

Même là-dessus, ils nous ont menti! Ils sont à augmenter le financement privé des soins et services, et à nous ramener au temps où l’accès aux soins de santé dépendait de l’épaisseur du portefeuille.

Aujourd’hui, nous demandons aux députés libéraux : qu’ils se rappellent que le grand parti libéral de Jean Lesage et de Robert Bourassa  n’aurait jamais posé de tels gestes, en prétextant faire le contraire.

Aujourd’hui, à la veille de la reprise des travaux à l’Assemblée nationale, nous disons  aux députés libéraux qu’il ne suffit pas de cesser d’applaudir lors de la période de questions: nous leur demandons de cesser cette marche vers plus de privé en santé, de rappeler à l’ordre le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, et de lui rappeler que la santé, ce n’est pas un privilège, c’est un droit, et qu’au Québec, on a déjà fait ce choix. »

Jacques Benoit

Coordonnateur de la Coalition solidarité santé.

Allocutions et discours Documents Frais accessoires

FRAIS ACCESSOIRES

JE ME SOUVIENS…

En campagne électorale, le chef du Parti libéral du Québec, Philippe Couillard, et son candidat vedette dans Brossard, le Dr Gaétan Barrette, promettaient l’ouverture de 50 supercliniques dans lesquelles, disaient-ils, « les citoyennes et citoyens du Québec pourraient payer avec leur carte d’assurance maladie. »

18 mois plus tard, le chef du Parti libéral s’est transformé en premier ministre, le candidat vedette en ministre de la Santé et des Services sociaux, les supercliniques ne sont pas encore ouvertes mais  la carte d’assurance maladie, elle, se transforme déjà en carte de crédit.

Les frais accessoires ne sont que la pointe de l’iceberg des soins et services que devront payer les citoyennes et citoyens. Déjà, une révision à la baisse de l’offre de services et soins nécessaires a créé et allongé des listes d’attente qui ont forcé plusieurs à recourir au privé, parce qu’il n’y a pas de liste d’attente pour les maladies et les besoins : les cas continuent de s’aggraver. Ceux et celles qui n’ont pas les moyens de payer se reposent sur leurs proches, en majorité des femmes, ou alors doivent s’en passer.

Et cet état de choses va s’amplifier : le Commissaire à la santé et au bien-être tient depuis cet été des consultations sur le panier de services assurés. En même temps, les experts de l’Institut national d’excellence en santé (INESSS) doivent aider les établissements à définir ce qui est pertinent ou non comme soins et services, et l’objectif rendu public à la fin août est de couper 450M$ ans le réseau d’ici le 1er avril prochain.

Les frais accessoires sont l’exemple, le cheval de Troie par lequel la désassurance de soins et services va passer.

Pourtant, dans la dernière année, sur tous les tons et à tour de rôle, le premier ministre Couillard, et les ministres Barrette, Leitao et Coiteux nous ont répété que « peu importe qui fait la prestation de services, l’important est que le financement soit public ».

Même là-dessus, ils nous ont menti! Ils sont à augmenter le financement privé des soins et services, et à nous ramener au temps où l’accès aux soins de santé dépendait de l’épaisseur du portefeuille.

Aujourd’hui, nous demandons aux députés libéraux : qu’ils se rappellent que le grand parti libéral de Jean Lesage et de Robert Bourassa  n’aurait jamais posé de tels gestes, en prétextant faire le contraire.

Aujourd’hui, à la veille de la reprise des travaux à l’Assemblée nationale, nous disons  aux députés libéraux qu’il ne suffit pas de cesser d’applaudir lors de la période de questions: nous leur demandons de cesser cette marche vers plus de privé en santé, de rappeler à l’ordre le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, et de lui rappeler que la santé, ce n’est pas un privilège, c’est un droit, et qu’au Québec, on a déjà fait ce choix. »

Jacques Benoit

Coordonnateur de la Coalition solidarité santé.

Allocutions et discours Documents Frais accessoires

SI LE PASSÉ EST GARANT DE L’AVENIR…

(Présentation de Jacques Benoit, coordonnateur de la Coalition solidarité santé)

(Vidéo de l’Assemblée)

Le 1er avril 2015 entrera en vigueur le PROJET DE LOI 10. Dans chacune des régions du Québec, des CSSS seront fusionnés avec d’autres établissements et l’Agence régionale pour créer d’immenses Centres intégrés de Santé et de Services sociaux (CISSS) ou Centres intégrés universitaires de Santé et de Services sociaux (CIUSSS). Des 182 établissements existants, le réseau public de santé et de services sociaux du Québec ne comptera plus que 34 établissements.

Le 1er avril 2015, le ministre de la Santé et des Services sociaux deviendra le principal décideur de toutes questions tant locales, régionales que nationales, il contrôlera tout, tant la prestation que le prestataire des soins et services, il nommera ou démettra toutes personnes responsables. Ainsi, que l’on travaille dans le réseau public de la santé, ou dans le milieu communautaire qui y collabore, ou qu’on soit simplement citoyenne et citoyen du Québec ayant droit à la santé et à des soins et services publics de santé, personne ne sera épargné. Le ministre dit qu’il sabre la bureaucratie, mais dans les faits, il coupe plutôt dans la démocratie.

Le 1er avril 2015, avec l’application du PROJET DE LOI 10, débutera la plus grande entreprise de privatisation du système public de santé et de services sociaux québécois. 

Parce que, comme on dit, « si le passé est garant de l’avenir,… »

Allons voir ce passé pas si lointain. 

Mais avant, nous tenons à vous faire cette mise en garde : toute ressemblance avec des personnes ou des événements existants ou ayant existé pourrait ne pas être que pure coïncidence.

Nous sommes en 2003. Le 4 avril : élection du Parti Libéral à Québec; premier ministre : Jean Charest; ministre de la Santé désigné: Philippe Couillard.

6 mois plus tard, à l’automne : dépôt par le ministre Couillard du PL 25 qui fusionne les hôpitaux, les CHSLD et les CLSC pour former des Centres de Santé et de Services sociaux (CSSS), et créer les Agences régionales de SSS. Les objectifs poursuivis : améliorer l’accès aux services, diminuer la bureaucratie, faire des économies.

Le 19 décembre: imposition d’un bâillon pour l’adoption du PL 25.

2006, en juin : dépôt par le ministre Couillard du PL 33 permettant trois chirurgies en clinique privée et leur couverture par des assurances privées.

6 mois plus tard, le 13 décembre : imposition d’un bâillon pour l’adoption du PL 33.

2007 : par voie règlementaire, le ministre Couillard permet aux médecins de s’incorporer (DR INC). Ceux et celles qui changeront de statut légal changeront également de statut fiscal, pouvant être reconnus comme entreprise privée, et ayant ainsi accès à des déductions pour entreprises.

En juin 2008 : d’abord le 18, par décret, le ministre Couillard ajoute une cinquantaine de traitements médicaux ou de chirurgies pouvant être réalisées en cliniques privées spécialisées avec couverture d’assurances privées (Vous vous souvenez du PL 33 adopté sous le bâillon en 2006? de trois chirurgies, on passe à 50! Ça s’appelle avoir de la suite dans les idées).

Puis, une semaine plus tard, le 25 juin : toujours par décret, le ministre Couillard réduit de moitié le coût des permis de clinique privée spécialisée, avant de démissionner et de quitter la politique.

Moins de 2 mois plus tard, le 18 août : M. Couillard rejoint Persistence Capital Partners, une société qui se décrit elle-même comme « le seul fonds privé d’investissement au Canada dédié à développer des opportunités d’investissement offrant un fort potentiel de croissance dans le secteur de la santé ». M. Couillard parle d’acquisitions futures, pour PCP, de « cliniques d’imagerie médicale […] ou de cliniques médicales ou de chirurgie, comme la Clinique Rockland ».

Toujours en 2008, en décembre : devant une assemblée d’assureurs, le nouveau partner Couillard plaide pour le privé en santé, expliquant qu’on devrait «autoriser l’ouverture de plus de cliniques privées associées, permettre aux médecins québécois de pratiquer dans le privé et autoriser les Québécois à contracter des assurances privées pour des actes couverts par le régime public ». Il ajoute qu’«il n’y a rien de scandaleux à ce qu’on fasse des profits dans le secteur de la santé» et que « l’une des réalisations dont il [était] le plus fier en cinq ans passés à la tête du ministère de la Santé, c’est l’entente [de sous-traitance pour des chirurgies] conclue avec [la clinique médicale privée] Rockland MD ».

En 2010, un rapport d’évaluation du MSSS fait état qu’après six ans de fusion des CSSS, il n’y a pas d’amélioration d’accès aux services, que la surcharge de travail observée au début chez les gestionnaires est toujours aussi importante sinon plus, que la distance entre les installations complexifie la gestion, que la structure organisationnelle n’est pas encore totalement stabilisée, que les membres du personnel se sentent isolés et peu soutenus, que dans plusieurs CSSS, la stabilité de l’organisation n’est pas encore gagnée et qu’il y a un sentiment de confusion à savoir qui relève de qui et qui fait quoi.

De plus, presque tous les sites ont eu recours à des consultants ou à des firmes extérieures privées pour certains dossiers tel le soutien des cadres intermédiaires dans la gestion du changement ou la rédaction de documents stratégiques. 

Je le rappelle : cette évaluation est faite six ans après des fusions qui ont réunies sous une seule administration de CSSS en moyenne une dizaine d’établissements, et jusqu’à 18 pour le plus gros, celui de Laval.

Il y a un an presque jour pour jour, le 12 Mars 2014, la Coalition solidarité santé tenait ici même au Centre St-Pierre une assemblée publique pour faire le bilan de 10 ans des CSSS.  Les panélistes étaient David Levine, ex-PDG de l’Agence de la Santé et des Services sociaux de Montréal, André-Pierre Contandriopoulos, professeur et chercheur à l’Université de Montréal, René Lachapelle, ex-organisateur communautaire du réseau de la santé et chercheur associé à l’UQO et Johanne Archambault, ex-responsable de l’Observatoire québécois sur les réseaux locaux de services. 

Ces personnes nous ont fait part de leur évaluation respective des fusions d’établissements, et des résultats obtenus au regard des attentes.

Pour toutes les personnes présentes à l’assemblée, panélistes inclus, les fusions de 2004 n’ont pas rempli les promesses faites. Au contraire, elles ont plutôt causé les problèmes suivants :

1) Augmentation du pouvoir des médecins au détriment de la première ligne

2) Perte de proximité des services

3) Peu (ou pas) d’intégration ni de continuité des services, approche populationnelle trop complexe

4) Coupures et réductions de services

5) Détérioration des services sociaux

6) Des structures trop grosses et ingérables

7) Recul de la démocratie

8) Impact négatif sur le personnel et les relations de travail

9) Une gestion inappropriée: la Nouvelle gestion publique

10) Augmentation de la privatisation.

Dix problèmes pour dix ans de fusions.

Le dernier problème, l’augmentation de la privatisation, c’est le pire des résultats qu’on a vu se développer avec les fusions. On a utilisé les ressources du public au service du privé, contrairement à ce que disait le gouvernement libéral de l’époque (son slogan était « le privé au service du public »).  On a ainsi sous-traité des services d’entretien, de buanderie, d’alimentation, de fournitures médicales, des services à domicile, des chirurgies, des agences de personnel, et on a utilisé des PPP pour des hôpitaux, dans l’hébergement, etc. 

En dix ans, la sous-traitance, la privatisation, l’économie-socialisation, la communautarisation et les PPP ont pris place et sont mieux implantés partout dans notre système public de santé et de services sociaux. 

En 10 ans, les budgets de la santé ont doublé, et le nombre de cadres a augmenté de 30%.

Et le PL 10 que nous a présenté le ministre Barrette, de par ses fusions à beaucoup plus grande échelle encore, ne fera qu’amplifier tous ces problèmes, privatisation incluse. Alors, si ce n’est pas le résultat escompté, il est encore temps de faire marche arrière : on ne peut faire la même erreur deux fois, parce que la deuxième fois, ce n’est plus une erreur, c’est un choix!

D’ailleurs, deux organismes qui ont appuyé le PL 10 nous laissent croire que ce n’est pas une erreur. 

D’abord, la Fédération des Chambres de commerce du Québec (FCCQ), qui écrivait lors de la commission parlementaire : 

« …le secteur public doit envisager, de façon pragmatique, des alliances avec le privé,… La Fédération signale aussi que la sous-traitance dans la production d’un service public ou d’une de ses composantes peut être aussi bien livrée par une entité publique [que] par une entreprise privée, une coopérative ou une OSBL. De plus, d’un point de vue de développement économique, les entreprises peuvent profiter des marchés publics pour prendre de l’expansion. Dans les fonctions susceptibles de faire l’objet d’une sous-traitance concurrentielle, la Fédération indique notamment les fonctions auxiliaires (comme l’entretien ménager ou les services informatiques), les chirurgies d’un jour ou encore l’hébergement et les soins de longue durée pour personnes âgées. »

Elle ajoutait également que : 

« La modification de l’organisation et de la gouvernance du système de santé […] s’insère dans la révision générale de la fiscalité et des programmes de l’État, à laquelle la FCCQ participe activement. Tel que mentionné dans son mémoire présenté aux commissions Godbout et Robillard, la FCCQ rappelle que l’exercice de fond que le gouvernement du Québec est en train de mener doit s’inscrire dans une réflexion plus large sur les rapports entre l’État et les entreprises. L’État peut en fait être un état-percepteur, à travers la fiscalité des sociétés; un état-soutien, à travers les programmes et mesures d’aide aux entreprises; ou encore un état-acheteur, à travers le choix des modes de production et de fourniture des services publics.

L’autre organisation ayant appuyé le PL 10, l’Institut sur la gouvernance des organisations privées et publiques (IGOPP), ajoutait ce conseil: 

Le modèle de gestion proposé par le projet de loi 10 […] est bien rodé dans le secteur privé où il porte le nom de «gouvernance stratégique » ou « gouvernance interne ». Toutefois, ce modèle de gestion est rare et méconnu dans le secteur public. Il faudra donc devenir clair et explicite quant à son fonctionnement et fournir aux dirigeants des CISSS la formation appropriée. »

Devrions-nous ajouter que le PL 10 consacre également l’omnipotence du ministre et de son ministère, ce qui revient à dire que l’on consacre l’éloignement des milieux, le déracinement, et la méconnaissance des complexités du terrain. C’est la recette parfaite pour augmenter l’inefficacité, les erreurs et le gaspillage, sans diminuer les budgets consacrés à l’administration.

Mais revenons à notre voyage dans le temps. 

En avril 2014, le 7 avril plus précisément : élection du Parti Libéral à Québec; premier ministre : Philippe Couillard; ministre de la SSS : Gaétan Barrette.

À l’automne (6 mois plus tard –encore?) : dépôt par le ministre Barrette du Projet de loi 10 fusionnant tous les établissements, les CSSS et l’Agence régionale SSS d’une même région (sauf exception) pour former d’immenses Centres Intégrés de Santé et de Services sociaux (CISSS) ou Centres Intégrés Universitaires de Santé et de Services sociaux (CIUSSS). Objectifs : Améliorer l’accès aux services, diminuer la bureaucratie, faire des économies!

7 février 2015: imposition d’un bâillon pour adopter le PL 10.

Et en février, Radio-Canada annonçait qu’après 7 années de DR INC, 45 % des 22 500 médecins du Québec (près de 10 250) sont incorporés, ce qui fait perdre plus de 150 M$ d’impôts aux gouvernements.

Alors, que devrions-nous prévoir pour les années à venir?

Vous l’avais-je dit au début?… Si le passé est garant de l’avenir,… je vous laisse prédire la suite.

Avant de terminer, j’aimerais encore dire…

Lors de l’étude article par article en commission parlementaire, Françoise David a proposé un amendement: biffer à l’article 1 les objectifs du projet de loi 10, parce que ce n’est pas vrai que le PL 10 va simplifier l’accès aux services, améliorer la qualité et accroître l’efficience. 

Bien qu’incapable d’identifier un article qui y concourrait, qui en parlait ou expliquait comment cela allait se faire, bref, qui démontrait l’adéquation entre les objectifs de son PL et les moyens qu’il contient, le ministre s’est dit convaincu que « l’ensemble de sa réforme » allait atteindre ces objectifs et, par conséquent, l’amendement fut rejeté. 

Le ministre l’avait pourtant dit lui-même très clairement lors de notre passage en commission parlementaire : 

« J’l’ai dit cent fois en trois semaines : le projet de loi 10, en termes d’accès à la première ligne, c’est pas ça qui va régler ça, c’est autre chose. Le «autre chose» est en train de se discuter et on verra bien où c’est que ça va finir. J’l’ai dit, là. J’peux pas être plus clair que ça : ne reprochez pas au projet de loi 10 de ne pas s’adresser à l’accès alors qu’il n’est pas fait, le projet de loi, pour s’adresser à l’accès.”

Ça m’apparaît pourtant essentiel et fondamental : le ministre contredisait son propre projet de loi!  

Et en ce qui me concerne, ça ressemble drôlement à quelque chose…

D’ailleurs, sur le site du SPVM , on trouve cette définition :

« La fraude consiste à mener malhonnêtement le public ou une personne à encourir une perte financière, à se départir d’un bien ou à fournir un service à la suite d’une tromperie, d’un mensonge, d’un abus de confiance ou de tout autre moyen semblable.

Comment différencier un VOL d’une FRAUDE?

La présence ou l’absence de consentement demeure le critère permettant de distinguer le VOL de la FRAUDE. Ainsi,

– il y aura VOL lorsqu’une personne s’empare d’un bien sans le consentement  de la victime.

– il y aura FRAUDE lorsqu’une personne s’approprie un bien, un service ou de l’argent avec le consentement de la victime, mais que ce consentement a été obtenu par tromperie ou ruse ou tout autre moyen malhonnête. »

Alors, selon vous, pourrait-on dire que…

… Le ministre mène malhonnêtement la population du Québec à encourir une perte financière, à se départir d’un bien (comme le réseau public de SSS pour le privatiser)?

… Que de par l’omnipotence qu’il se donne avec son PL, il s’approprie tous les services publics sociaux et de santé, avec le consentement de la victime (la population, l’Assemblée nationale), mais que ce consentement est obtenu par tromperie ou ruse ou tout autre moyen malhonnête (comme sa seule parole, son instinct, sa conviction personnelle,… et à l’encontre de tout ce qui se fait, se dit, s’écrit, s’étudie et s’enseigne partout dans le monde)?

D’après vous, pourrait-on porter une accusation?…

 

Merci de votre attention.

Allocutions et discours Documents Événements et actions Privatisation Lean

Déjà plusieurs années que cette question des frais accessoires surfacturés revient sur la table.

Déjà plusieurs ministres de la SSS qui se sont succédés sans rien régler à cette question.

Et pourtant, le problème est on ne peut plus clair: la surfacturation des frais accessoires n’a pas lieu d’exister, sinon pour la seule raison de faire de la santé une occasion d’affaire sur le dos de la population. 

Le ministre Barrette nous disait cette semaine en commission parlementaire sur son PL 10 qu’il n’a pas  besoin de personne pour savoir ce qui est bon pour le réseau de la santé et des services sociaux, et pour la population : lui, il le sait. Alors, nous lui demandons aujourd’hui : pourrait-il nous expliquer à nous, humbles intervenants et usagers que nous sommes, en quoi surfacturer les frais accessoires c’est si bon pour la population et pour le système public de santé et services sociaux?  Est-ce que ça améliorerait l’accessibilité aux soins?  Est-ce que ça apporterait plus de services à la population? Est-ce que ça permettrait de protéger notre système public de soins de santé et de services sociaux?

Même si le ministre Barrette n’a pas besoin de nous pour savoir ce qui est bon, nous allons tout de même répondre à ces questions: 

– non, cette surfacturation n’améliore pas l’accessibilité, bien au contraire : bien des gens n’ont pas les moyens de la payer, et par conséquent, ou ils se priveront des soins, où ils se priveront par la suite de l’essentiel pour leur vie en coupant dans leurs dépenses de médicaments ou d’alimentation, ou quoi d’autre encore, parce qu’ils n’auront pas d’autres moyens;

– non, cette surfacturation n’apporte pas plus de services à la population : elle n’apporte que plus d’argent dans les poches de ceux et celles qui perçoivent les frais accessoires, de ceux et celles qui en profitent pour faire de vraies affaires;

– non, cette surfacturation ne protège pas notre système public de soins de santé et de services sociaux : elle vient créer deux catégories de malades et de soignés : l’une qui aura les moyens de se payer les soins et services, et l’autre qui ne les aura pas. Et la catégorie qui ne les aura pas, non seulement ne pourra se soigner, mais peut-être verra son état se détériorer, et, son cas s’aggravant, coûtera plus cher au système public pour lui donner les soins nécessaires. Est-ce que c’est cela, bien gérer les fonds publics, M. le ministre?

La surfacturation des frais accessoires, tout comme le PL 10, n’ont qu’une seule raison d’exister : faire de la santé une occasion d’affaire, pour les « vraies affaires ».

MM. les docteurs Barrette et Couillard, nous vous le demandons aujourd’hui : arrêtez d’écouter la Fédération des chambres de commerce et le monde des vraies affaires, et prenez donc plutôt soin de la population du Québec.

La santé n’est pas une occasion d’affaires! 

Allocutions et discours Documents Frais accessoires